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Faisons de Paris la première « ville plate-forme »

Ma tribune parue dans "les Echos"

Le monde reste sidéré devant l’accaparement planétaire de nos sociétés par la puissance algorithmique de quelques grandes entreprises qui s’érigent comme de nouvelles « superstructures ».

Les GAFAM ont su comprendre, les premières, que la miniaturisation des transistors, avec l’octroi d’un ordinateur de poche à chaque citoyen, allait entraîner une redistribution inédite du pouvoir. Cette nouvelle répartition des rôles leur permet de se jouer des Etats et de toutes les formes d’intermédiation, en organisant le face-à-face direct avec les citoyens pour repenser les usages et livrer de nouveaux services. Ce que le client veut, les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) et les NATU (Netflix, Airbnb, Tesla et Uber) lui donnent.

Les autorités démocratiques restent désemparées par la capacité de contrôle qu’un réseau social peut exercer sur ses membres. L’élection de Trump et les « Gilets jaunes » sont dans l’esprit de chacun d’entre nous.

Le préambule de la Constitution de 1946 stipule que « Tout bien, toute entreprise, dont l’exploitation a ou acquiert les caractères d’un service public national ou d’un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité ». La réglementation des nouveaux monopoles est une interrogation sans réponse. Il est question, pourtant, de souveraineté nationale d’autant que ces entreprises mondialisées se jouent des règles des pays.

Le Grand débat national a remis, à l’ordre du jour, la supériorité du lien humain. Il a permis de rappeler que notre organisation démocratique repose sur une maison commune, la mairie. C’est la Révolution Française qui érigea en communes ce lien social de toutes les anciennes communautés ou paroisses au nom d’une promesse égalitaire entre tous les citoyens où la raison l’emporterait sur la tradition et la croyance.

En cette période de trouble politique qui fracture le consensus national, nous devons retrouver cet esprit des « révolutionnaires » et fabriquer à nouveau du consentement au niveau local pour faire face aux transformations de nos sociétés qui modifient en profondeur notre rapport à la nature mais aussi à l’humain, dans notre façon d’être en relation les uns avec les autres, d’apprendre et de travailler ensemble, de produire et de consommer avec raison.

Notre maison commune, la mairie, a été construite pour accueillir l’administration et les réunions du conseil. Cela ne suffit plus pour se confronter aux défis qui nous attendent. Le monde est reconfiguré par le numérique. Ne craignons pas de regarder ce qui marche et qui exprime, d’une certaine manière, le style de l’autorité politique que les citoyens attendent et qui est la caractéristique de relations sociales plus horizontales.

Paris est notre « bien commun ». Elle doit s’ouvrir à tous les parisiens et devenir cette ville plate-forme de plus de deux millions de citoyens qui choisissent, ensemble, ce qu’ils veulent pour Paris, en interagissant partout et à tout moment, les uns avec les autres, pour évaluer les services dont ils bénéficient, construire les réseaux d’entraides dont ils ont besoin et dessiner les solutions de demain.

Paris doit faire preuve d’intelligence. Elle doit accepter de ne pas toujours faire à la place des autres mais de s’allier avec les citoyens-entrepreneurs du monde entier pour repenser les usages des parisiens et créer de nouveaux services au plus près de leurs attentes. Ne laissons pas les GAFAM et les NATU profiter de leur position hégémonique pour verrouiller l’innovation en captant le meilleur des talents et des start-up.

Paris doit faire preuve d’agilité. La verticalité de l’administration n’est plus adaptée. Nous devons alléger la lourdeur organisationnelle et créer des cadres d’innovation et d’expérimentation ouverts aux chercheurs et aux experts pour apporter une culture scientifique, industrielle et technique.

Chacun le perçoit, ce n’est pas de l’ajustement d’un modèle dont nous avons besoin, mais bien d’un changement radical et d’une réforme profonde de l’organisation municipale pour faire de Paris, la première ville plate-forme au monde.

Faisons-le, à notre manière, de manière souveraine et maîtrisée, en nous appuyant sur les 55.000 agents de l’administration parisienne. A la différence d’une entreprise, Paris ne recherche pas de profit voire de rentabilité pour les capitaux qu’elle a investis. Paris n’a de compte à rendre qu’à ses seuls actionnaires, les Parisiens, et n’a à se préoccuper que du bon usage de l’argent public pour ses habitants et pour la planète, trop souvent absente des décisions qui, pourtant, la concernent.

Notre société a besoin que nous fixions de nouvelles règles du jeu pour vivifier ce lien démocratique. Je suis favorable à une obligation d’inscription de tous les habitants auprès de leur mairie qui soit couplée avec l’inscription sur les listes électorales pour sceller ce pacte républicain et les règles du vivre ensemble.

L’inscription donnera accès à la plate-forme de mise en relation de tous les parisiens et aux services délivrés par la mairie. Grâce à une identité numérique protégée des prédateurs, les Parisiens bénéficieront d’une administration simplifiée et plus réactive avec de nouveaux services conçus au plus près de leurs besoins.

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