Phynances
Intervention au Conseil de Paris sur le Débat d’Orientation Budgétaire 2015 – Octobre 2014
Ce débat d’orientation budgétaire est le premier de la mandature. Oui il est particulièrement important, car il est significatif de ce que nous en attendons, en termes de contenu comme de méthode. Il a lieu suffisamment en amont du budget lui-même pour qu’il soit un vrai temps d’échanges. Le temps du budget n’est pas encore venu, et j’ai bien senti la tentation de certains d’anticiper. Ne confondons pas les calendriers. Ne confondons pas propositions et décisions. Nous avons eu le courage de proposer des pistes, de mettre les sujets de réflexion sur la table, justement pour qu’il y ait un vrai débat éclairé et apaisé, comme l’a bien dit JB BROS.
On nous avait annoncé pis que pendre, on allait voir ce qu’on allait voir sur le DOB, et finalement j’ai vu du calme, c’est bien.
Et ce débat est pour moi l’occasion de réaffirmer, avec constance, le cap que nous nous sommes fixés : nous préparons l’avenir de Paris, nous œuvrons au service des Parisiens, avec sérieux et avec détermination. Les axes évoqués sont en conformité et en cohérence avec les engagements que nous avions pris et qui ont été validés par les citoyens. Ainsi faisons nous deux choix structurants : celui de maintenir le taux d’imposition des ménages au niveau décidé en 2009, afin de préserver le pouvoir d’achat des Parisiens ; et celui de poursuivre notre effort d’investissement, autour de priorités bien identifiées : le logement, les transports, la transition énergétique, et les actions en faveur des quartiers populaires.
Je voudrais en résumer les éléments par cinq verbes : se loger, se déplacer, s’éduquer, s’épanouir, se soigner, comme la communication sur la santé à cette même séance en témoigne. Sandrine CHARNOZ et Catherine BARRATI-ELBAZ ont parfaitement décrit ces grandes lignes.
Ce volontarisme pour construire un budget de combat se situe dans un contexte inédit, désormais bien connu de toutes et tous, nombre d’orateurs l’ont relevé : s’agissant du budget de fonctionnement, nos marges de manœuvre sont extrêmement contraintes, beaucoup plus que par le passé, puisque, comme vous le savez tous, nous sommes menacés de perdre 600 M€ sur les trois prochaines années, pour ne parler que de la dotation globale de fonctionnement – même si sur ce point nos échanges avec le Gouvernement continuent d’être exigeants. Je sais que Nicolas BONNET et son groupe formulent des propositions constructives de réforme des finances locales, je les écouterai.
La péréquation quant à elle s’accroît de 70 M€ en 2015 : qui peut reprocher à Paris son manque de solidarité régionale ou nationale ? La progression des péréquations, légitime, ne doit pas venir amputer nos capacités d’action et doit être bornée par des limites raisonnables. La crise sociale se prolonge hélas, induisant automatiquement une hausse des dépenses sociales obligatoires, dont le RSA, ce triple choc extérieur (dotation / péréquation / crise), Mme de SARNEZ : c’est la réalité du contexte, et cela n’entrave pas notre créativité au contraire, mais il faut aussi reconnaitre les réformes quand elles sont là.
Heureusement, dans ce contexte difficile, que nos fondamentaux sont sains : la dette par habitant est limitée à 1600 €, contre 3 600 € à Marseille, 1 950 € à Bordeaux, et le taux d’endettement de Paris est pratiquement deux fois inférieur à celui des autres grandes villes françaises ; il était de 46 % au 31 décembre 2013 contre 81 % pour les villes de plus de 100 000 habitants. Ce ratio, comparativement bas, témoigne de la bonne gestion financière de ces dernières années, même si l’opposition continue à dire systématiquement le contraire. Vous n’êtes pas audibles sur ce point car vous n’êtes pas crédibles. Nous empruntons à un taux historique de 2% à 13 ans.
L’endettement des collectivités locales a un sens économique, M. Saint Etienne, M. De Froment. Construire aujourd’hui une piscine ou une école qui sera utilisée les décennies suivantes : quoi de plus logique que de répartir le financement par les usagers d’aujourd’hui, mais aussi de demain, au lieu de faire supporter l’entièreté de la charge par les Parisiens du présent à qui il serait demandé une contribution démesurée ? Evoquer l’évolution de l’encours de dette sans considérer la nature des dépenses réalisées, c’est aussi simpliste et réducteur. Le programme d’investissements de la mandature que nous vous présentons dans cette communication est ambitieux pour Paris, nous pourrions, comme l’opposition a l’air de le suggérer – mais une fois encore je n’ai pas entendu de proposition claire et cohérente – freiner nos investissements, ou du moins les réduire au minimum, en réaction au contexte de resserrement de nos marges de manœuvre financières, comme l’ont annoncé plusieurs grandes villes. Mais ce ne serait pas conforme à nos engagements, et ce ne serait pas responsable. Paris sera la seule grande collectivité à ne pas sacrifier l’investissement, comme l’a rappelé Rémi FERAUD. Aujourd’hui, les collectivités assurent 70 % de l’investissement public ; il est de notre responsabilité de maintenir notre effort d’investissement, pour répondre aux préoccupations des Parisiens, mais aussi pour contribuer à l’emploi, à la croissance économique, à l’activité parisienne. Nos investissements engendrent 30 à 50 000 emplois directs et indirects par an, Mme PREMEL l’a rappelé. Ils sous-tendent l’attractivité qu’exerce Paris sur les entreprises, sur les touristes. En investissant intelligemment, nous créons les conditions de la reprise.
Nous prenons nos responsabilités, donc, et nous maintenons un effort d’investissement conséquent de 8,5 Mds€ ; avec, pour priorité absolue, la création de 10 000 nouveaux logements par an, majoritairement sociaux. Notre programme d’investissement est axé, également, sur la lutte contre l’insalubrité, sur la transition écologique, avec la mise en œuvre, dès l’année prochaine, du plan de lutte contre la pollution. Nous financerons un nouveau plan crèches, afin de proposer 5 000 nouvelles places d’accueil en ciblant les territoires prioritaires. Nous poursuivrons notre effort en faveur des locaux scolaires.
Ces projets, nous les assumons et nous les réaliserons. C’est un programme d’investissement de la mandature pour les Parisiens, au service des Parisiens, et avec la liste que je viens de dresser, j’ose espérer que personne ne viendra en douter. Ces projets impacteront nécessairement notre encours de dette ; c’est souvent le cas : quand les collectivités investissent, elles empruntent ; mais uniquement pour investir, je le rappelle ! Nous aurons par ailleurs à cœur de maîtriser l’évolution de notre dette ; nous explorons de nombreuses pistes, visant à créer de l’autofinancement : nous dynamiserons nos recettes foncières, avec des objectifs d’usage des biens cédés, le conseil de l’immobilier sera associé, et nous examinerons par ailleurs les recettes qui découlent de la mise à disposition de notre domaine public, je tiens à rassurer Jean-Bernard BROS et suis à l’écoute de ses idées. Notre cible, c’est de faire progresser notre encours de dette à l’échelle de la mandature à un rythme identique à celui de la mandature précédente. C’est cette trajectoire que nous suivrons. Alors oui, nous assumons une dette soutenable pour un investissement durable, selon la formule de David BELLIARD.
Pour préserver l’investissement, il est indispensable de réaliser des économies de fonctionnement. Je remercie les Adjoints pour leur mobilisation dans ce travail qui se poursuit. Nous avons commencé à étudier en détail l’ensemble de nos dépenses de fonctionnement. Déjà, 5M€ sont économisés chaque année grâce à la réduction du nombre d’Adjoints et Collaborateurs. Nous sanctuariserons ce qui relève de nos compétences obligatoires, sur les aides sociales légales, par exemple. Mme SOUYRIS, je vous réponds. La masse salariale sera maîtrisée puisqu’elle sera en évolution de 1,4 % par rapport à notre prévision d’exécution. Le plan social, c’est peut-être le projet de l’opposition, mais pas le nôtre ! Mme Koscusko-Morizet, M. Saint-Etienne c’est d’ailleurs le seul levier que vous évoqués finalement dans ce débat. J’ai hâte que vous nous disiez quels services vous allez supprimer, quand et comment !
Nous nous prévoirons les crédits nécessaires au maintien de la qualité de nos services publics, et donc de la qualité de vie des Parisiens, que ces crédits concernent le secteur scolaire et périscolaire, le secteur de la petite enfance, la propreté, le secteur de la lutte contre l’exclusion, le secteur de l’insertion et de l’emploi, etc.
Nous identifierons les économies qu’il est possible de réaliser qui sont les plus justes socialement, qui ont le moins d’impact pour le public parisien. Nous pouvons en attendre 130 à 180 M€ d’économies, par rapport au tendanciel de nos dépenses, en réduisant les fonctions support, à hauteur de 35M€, ou les fluides comme l’a dit M. Gleizes, en faisant partager un effort acceptable à nos partenaires qui doivent se confronter au même exercice que nous. Ces économies découleront d’une revue exhaustive, fondée sur différents critères, comme la bonne santé financière des tiers, la diversité de leurs ressources mobilisables. Certains crédits d’entretien seront re-calibrés : Nous pouvons faire plus, mieux et moins cher
J’ai entendu les critiques contradictoires de l’opposition sur ces économies, trop ou pas assez M. Pierre Gaboriau ? Je précise à M. de Froment que sur la philharmonie, il y a eu confusion entre investissement et fonctionnement mais Bruno Julliard vous répondra.
Mais vous avez encore oublié de nous présenter vos alternatives, ce qui est dommage, les parisiens auraient pu en juger. Vous ne cessez d’esquiver le débat, en refusant de formuler des propositions concrètes, acceptez de dire ce que vous feriez : moins de logements sociaux ? Moins de préemptions : 13 000 familles ont échappées aux ventes à la découpe depuis 2001 grâce aux préemptions, moins d’investissements, mais lesquels ?
En même temps, et de façon paradoxale, votre compteur fou de dépenses continue de tourner à l’UMP à chaque séance de ce conseil ! Nous en sommes à plusieurs centaines de M€ de dépense. Vous restez contre la dépense en général mais pour en particulier, sans jamais expliquer comment vous sortez de cette contradiction, on attend avec impatience le contre budget.
Pour agir, sans toucher aux impôts des Parisiens, nous avons enfin identifié des recettes de fonctionnement, avec la justice et l’efficacité comme critères. La modernisation de la taxe de séjour – oui Messieurs Gaboriau, Saint-Etienne je vous entends, je sais que la modernisation n’est pas toujours le fort des conservateurs, mais ce n’est pas mal de réformer – je disais donc, cette taxe de séjour, sera nous l’espérons bien un premier levier, avec l’augmentation des tarifs sur les hôtels de luxe ; cette mesure sera évoquée – et j’espère adoptée – dans le cadre des débats sur le PLF. Et c’est une vraie modernisation, notamment pour les hôteliers, dès l’instant où nous pourrons passer la collecte de cette taxe au réel : ce seront 40 M€ de moindres charges pour la profession, et une contribution plus juste des touristes à la beauté de Paris et aux services qu’ils utilisent ; ce n’est quand même pas une mesure passéiste, pardonnez-moi. Mme Bache a très bien présenté ce point. Ni une hausse d’impôt des parisiens, vous pouvez persister dans cet argument fallacieux, mais ce n’est pas le cas. D’ailleurs, l’agence de notation S et P a soulevé que nous ne mobilisons pas le levier fiscal, difficile de s’appuyer sur les agences en omettant leurs analyses précises, et en les citant à moitié M. LEGARET.
Nous avons pour projet, par ailleurs, de réformer notre système de droits de stationnement, en simplifiant les tarifs et les règles de zonage, ainsi qu’en revalorisant les tarifs appliqués au stationnement des autocars de tourisme. C’est avant tout un levier de notre politique des déplacements, pour limiter l’usage de la voiture thermique individuelle en ville. Inciter à des comportements plus respectueux de l’espace public et de l’environnement, voilà notre axe de travail. Enfin, nous réformerons les tarifs de nos services publics, dans le sens d’une plus grande équité, en créant des tranches supplémentaires sur les plus hauts revenus, au-delà de 10 000 et 15 000 euros par mois, en tenant compte du nombre d’enfants.
Ces différentes pistes nous permettront de présenter un budget 2015 équilibré et sincère. Elles doivent être affinées, approfondies, détaillées. Elles constituent avant toute chose des réformes ambitieuses, courageuses, qui méritent d’être discutées, et non pas rejetées en bloc. Une fois encore, les Parisiens méritent mieux que des railleries ou l’absence de propositions.
Dans un moment de crise de confiance entre les citoyens et la chose politique, il nous appartient de redonner ses lettres de noblesse à l’action publique. Nous en posons à notre niveau des jalons. D’abord, notre politique c’est jouer carte sur table, en présentant en transparence là où nous en sommes de la préparation du budget pour redonner tout son sens à ce débat d’orientation budgétaire, avec réalisme. Vous osez parler de plan caché, quand ce qui domine la communication c’est précisément la plus grande clarté ! Ensuite, notre politique, c’est choisir le collectif, en associant le plus largement possible la majorité à ce travail, mais aussi en faisant vivre la première commission où l’opposition exerce pleinement son rôle, ce qui tient aussi à la personnalité de son Président, je voulais ici le saluer. Enfin, notre politique, c’est vouloir la cohérence, cohérence de la majorité et cohérence vis-à-vis des engagements pris devant les Parisiens, ce débat témoigne que nous les appliquons.
J’ai déjà eu l’occasion de le dire : méthode et contenu se rejoignent. La voie est parfois difficile en effet, comme vous l’avez dit Mme la Maire. Les chemins tortueux ne sont pas les plus directs. Les mauvaises façons de faire ne produisent rien de bon ni d’utile. La qualité de la méthode est aussi la meilleure garante de l’efficacité des résultats. La procédure budgétaire évolue. C’est ainsi que nous avons préparé ce débat, c’est dans ce même esprit que nous œuvrerons pour construire le budget.