Transportés

Le parisien se plaît mobile

leparisienseplaîtmobileL’enquête globale transport du STIF pour l’année 2010, publiée dans une relative indifférence au mois de juillet 2012 et le bilan des déplacements 2011 édité par la Ville de Paris en ce mois de décembre, confirment que les mobilités continuent d’évoluer à grande vitesse en Ile-de-France et à Paris. J’invite les lectrices et lecteurs à s’y rapporter afin de décortiquer ces statistiques détaillées fort bien présentées dans les deux cas. On y voit qu’en dix ans beaucoup de choses ont changé.

Quelles conclusions tirer de ces deux passionnantes études ? Des tendances qui s’accélèrent et quelques nouveautés.

En préalable, un rappel important : la mobilité s’est considérablement accrue en dix ans, les franciliens restant dans notre pays les plus mobiles… et nous sommes de plus en plus mobiles !

  1. La marche s’impose comme le mode de déplacement essentiel (60% de la part modale à Paris comme disent les spécialistes) : c’est le déplacement du quotidien, qui permet de profiter pleinement de l’espace public, d’y circuler, voire d’y manger, d’y discuter, etc. Ce n’est pas sans lien avec l’attachement des parisiens aux commerces de proximité, aux marchés  et plus généralement à tous les lieux qui font la qualité de vie parisienne.
  2. La voiture continue de reculer, et pour la première fois cette tendance gagne la  petite couronne. Seuls les habitants de grande couronne restent dépendants de leurs véhicules pour leurs déplacements, ce qui plaide pour le Grand Paris Express. 60% des Parisiens ne possèdent plus de véhicules personnels, 30% en petite couronne, et dans les communes limitrophes (accessibles en métro), le taux rejoint le taux parisien.
  3. Les mobilités alternatives, dites douces ou  actives, explosent. A commencer par le vélo, qui fait son entrée triomphale en ville depuis 10 ans, en grande partie porté par le succès de Velib’. C’est l’un des principaux enseignements des enquêtes : la multiplication par trois de la part du vélo en dix ans, accompagnée par la hausse sensible de la fréquentation des aménagements cyclables. Vous avez dit révolution culturelle ?
  4. Le deux-roues motorisé est considéré comme une réponse moderne, rapide, efficace par nos concitoyens. Cela ne va pas sans récriminations de la part des habitants sur l’insécurité, le bruit, la pollution engendrés.  La situation est paradoxale et classique : en même temps qu’il est de plus en plus utilisé, le deux-roues est critiqué… Notons que les chiffres ne traduisent pas l’impression vécue puisqu’ils sont très stables depuis 2001 (2% de la part modale)
  5. Les transports collectifs progressent, en raison d’une offre accrue et d’un choix de société en faveur de ce mode de déplacements. Ils représentent 27% des déplacements. Il existe en même temps des limites liées aux contraintes (saturation, horaires, circulation des bus, etc.). Ce résultat nous conforte dans les choix opérés en faveur du transport collectif et nous encourage à intensifier nos efforts.

Ces grandes évolutions ainsi résumées valident une politique de déplacement résolument tournée vers le rééquilibrage de l’espace public, la priorité donnée aux transports collectifs (plan bus, tramway, prolongement des lignes de métro) et l’encouragement aux mobilités alternatives.

Pour autant, il faut aussi en déduire des axes d’actions pour l’avenir

  1. Aménager l’espace public en pensant à tous les piétons, familles avec poussettes, enfants qui courent, séniors, personnes à mobilités réduites. Concevoir notre espace partagé à partir des usagers les plus fragiles, c’est le penser pour tous. Les zones de rencontres dans des quartiers très fréquentés ou au contraire très résidentiels sont l’un des éléments de la ville apaisée, moins bruyante et moins polluée.
  2. Aider les habitants d’Ile-de-France à se passer davantage de la voiture dans leurs trajets quotidiens, en les accompagnant, pour que cela soit vécu non comme une privation mais bien comme une libération. Il faut offrir des alternatives, dans un cadre de gouvernance renouvelé et amélioré pour élaborer une politique des déplacements sur deux échelles, celle de la zone dense (la métropole) et celle de la région.
  3. Œuvrer sans relâche pour les transports collectifs. Cela coûte de l’argent, mais c’est un investissement  vertueux pour les générations à venir. Les prolongements du tramway porte d’Asnières et de la ligne 14 à Saint-Ouen en 2017 ne doivent être que les précurseurs d’un plan d’ensemble comprenant le plan de mobilisation du Conseil régional et le Grand paris Express. A ce titre le prolongement de la ligne 10 au sud (Ivry) doit devenir une priorité forte. En tout cas, il nous est interdit de renoncer à l’ambition, quitte à dégager de nouvelles recettes pour financer les projets.
  4. Poursuivre la mise en place de la gamme complète des mobilités. Il faut jouer sur toutes les touches du clavier. Velib’, Autolib, Autopartage, covoiturage, transport fluvial de marchandises, fret par tramway, tous les outils concourent à inventer la ville mobile de demain. Les rabattements vers les gares existantes et à construire – en facilitant tous les types de déplacements vers les gares et pas seulement le stationnement –  sont une condition pour réussir cet éventail des possibilités.
  5. Innover, pour avancer. Rien de pire que le statu quo, même s’il faut bousculer les mentalités ou les idées reçues. Par petites touches, une volonté se dessine ainsi : le cédez le passage avec prudence à droite pour les vélos, un tarif social de stationnement pour les travailleurs de nuit, une flotte de bus électrique ou hybride, de nouveaux enrobés phoniques pour lutter contre le bruit… Les innovations technologiques et réglementaires doivent être mises au service d’une politique efficace et un service public des déplacements sous toutes leurs formes.

Ce que nous montrent les enquêtes sur les déplacements, c’est que les franciliens demandent un service public qui ne se résume pas aux transports collectifs, mais un vrai service public global, généreux, exhaustif de toutes les mobilités. Nous en avons posé beaucoup de fondements, tracé les grandes lignes de force, inventé une bonne partie des outils – la mise en cohérence à l’échelon pertinent est l’un des grands enjeux de la période à venir.

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