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Rapport annuel de la Cour des comptes : à lire, sans modération !

Le rapport annuel de la Cour des comptes est un moment politique, certes moins médiatisé, mais tout aussi stratégique, que le Salon international de l’Agriculture. Par ces temps, où il est de bon ton de faire du « bashing » des hauts fonctionnaires – ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas transformer leurs formations comme le préconise le rapport THIRIEZ – le rapport annuel permet de mettre en évidence l’état de nos finances publiques et d’évaluer certaines politiques publiques. Magistrat à la Cour avant mon élection, je ne suis pas complètement objectif mais je sais le sérieux et la qualité de ces rapports.
D’abord, il faut rappeler que les recommandations, souvent sévères, de la Cour des Comptes et des chambres régionales aux différentes administrations sont suivies en pratique. En effet, 75% des recommandations formulées en 2016 par la Cour ont été totalement ou partiellement mises en œuvres.
La Cour est dans son rôle d’alerte lors qu’elle met en garde sur le niveau élevé de la dette publique à fin 2019. En effet, l’endettement public atteint 98,8% en France, contre 86,4% en zone euro et 59,4% en Allemagne. Elle confirme néanmoins que le déficit public est bien passé sous la barre des 3% depuis 2017 et qu’il s’élèverait à 2,2% du PIB en 2020.
Ce rapport annuel confirme la poursuite de l’effort de réduction du déficit depuis 2017 qui, c’est vrai, se fait à un rythme différent du fait des mesures de baisses d’impôts en faveur des ménages. 17 milliards d’euros de pouvoir d’achat sont rendus aux Français en 2020, et je l’assume. Le sérieux budgétaire n’est pas un synonyme d’austérité, a fortiori dans un contexte de croissance européenne un peu morose. La réalité c’est que la dette est stabilisée, l’économie française reprend des couleurs et que l’emploi progresse comme jamais depuis dix ans.
S’agissant des politiques publiques, et il conviendra à la commission des finances du Sénat, comme au Gouvernement, de s’emparer de ces analyses :
- sur les aides personnelles au logement, la Cour souligne que le dispositif est très peu lisible et source d’inégalité de traitement. Pas moins d’un milliard d’euros d’aides personnalisées au logement ont été indûment versées en 2018. La mise en œuvre du calcul contemporain des APL qui sera mis en œuvre cette année permettra sans doute de corriger cela. De même, le dossier du « revenu universel d’activité » (RUA) doit être l’occasion de remettre en ordre les principales prestations sociales ;
- sur le service postal, la Cour indique que le Groupe La Poste, en dépit d’importants efforts de modernisation, est confronté à une baisse de 600 millions d’euros de son chiffre d’affaires du courrier chaque année. Le métier de facteur ainsi que le service public postal de demain devront évoluer ;
- sur l’École Polytechnique, la Cour s’inquiète de sa gestion et de sa situation financière et recommande in fine à l’État d’exercer une tutelle plus active. En effet, l’École Polytechnique est en déficit depuis cinq ans.
La gestion des politiques publiques en 2020 passe par la transformation numérique des administrations qui est un de mes thèmes favoris ! Cela se traduit par exemple par une utilisation plus efficace des données – qu’elles produisent – le rapport met en lumière les marges de progression du Ministère de l’Agriculture. Cela passe également par un changement profond des systèmes d’information, et donc l’appel à des compétences techniques en matière de développement informatique – c’est le cas de « Bercy » qui est pionnier en la matière.
Il n’en reste pas moins qu’il est difficile pour l’État d’attirer des talents d’informaticien et cela implique de nouveaux modes de recrutement.